mercredi 8 novembre 2017

Interview de Grégory Da Rosa - 2nd volet



Le premier volet se trouve ICI







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— Des doléances ? m’étonnai-je, ma voix résonnant démesurément entre les piliers et les voûtes la salle du trône.

— C’est bien cela, sénéchal, confirma l’architecte Rodenteux, chevrotant.

— Mais, voyons, Jacques… Des doléances, maintenant, alors que la ville est assiégée ?

— Tout à fait, sénéchal. Deux dames de grande importance demandent audience.

— Deux dames, dites-vous ? Et qui sont-elles ? D’où viennent-elles ?

Rodenteux, qui se tenait sur les quelques marches de l’estrade, obliqua ses yeux ronds sur ma vieille personne alors que j’étais inconfortablement assis sur le faudesteuil jouxtant le trône. Il monta une marche de plus, se pencha, et murmura à mon oreille :

— Sénéchal, ces dames viennent d’un royaume étrange et étonnement puissant, gouverné par les livres, peuplé de héros, de prophéties et de mondes innombrables. L’on nomme leur royaume Book en Stock.

— Boucan Stoque ?

— Absolument, sénéchal, absolument.

— Mais où donc se situe cet étrange pays ?

— Partout et nulle part à la fois, sénéchal, m’avoua-t-il d’un timbre étrangement aigu. Et c’est bien cela qui le rend puissant ! Ce royaume tout entier voyage de monde en monde, utilisant les manuscrits pour plonger en des univers que nous ne connaissons point encore. Mais sachez en tout cas qu’elles connaissent déjà tout de nous, c’en est effrayant ! Ce jour d’hui, justement, ces deux vénérables dames ont choisi la ville de Lysimaque pour visite. Comprenez ma pensée, sénéchal. Comme nous sommes en guerre, et étant donné notre situation pour le moins… menaçante – si vous me permettez cet euphémisme – je me suis dit qu’il serait bon de ne pas dénier le soutien d’un royaume tel que celui-là…

— Je comprends, Rodenteux. Je comprends.

— Dois-je les faire entrer ?

— Bien sûr, Rodenteux, bien sûr !

Le bonhomme se redressa tout à coup, pivota en direction du portail clos, tapa deux fois dans ses mains. À ce geste, l’ours Roufos, notre bon héraut d’armes, logé dans l’angle tout au bout de la nef, ouvrit les portes et beugla pis qu’un crieur public :

— J’annonce la dame Dup, duchesse Inette ! et la dame Emma, duchesse Phooka !

Alors les deux convives apparurent sur le seuil, la première vêtue d’une longue cotardie émeraude, aux franges et brocarts verts, tandis que la seconde arborait une houppelande plus blonde qu’un champ de blé au soleil, toute brodée de fils d’or.

Je me levai incontinent, descendis les marches de l’estrade et m’approchai pour baiser la main de mes deux invitées.

— Soyez les bienvenues, mes dames, déclamai-je. Puisse le séjour en la capitale vous être agréable. Mais dites-moi, ma curiosité est piquée au vif ! De quoi souhaitez-vous m‘entretenir ? Je suis tout ouïe.

Puis, soudain confus par mon manque évident de politesse, je proposai :

— Oh ! J’oubliais, mes dames : une coupe de vin, peut-être ? Je vous rassure, point n’est-il empoisonné. Enfin… je… je ne crois pas.



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Aely Nah :


Bonsoir Gregory,

Jolie mise en bouche , diantre ! et fichtre je ne m'attendais pas à côtoyer ainsi un tel beau linge mes duchesses !!

J'ai donc découvert ce "noble" sénéchal il y a peu et avec lui son franc parler, son charisme et ses faiblesses . Bon j'ai adoré voilà. 
Je vois que tu as déjà bien répondu à mes premières questions lol donc je me retrouve un peu dépourvue même si la bise n'est pas encore venue mais j'en aurais quand même une petite :
le cycle d'Ogier d'Argouges j'ai beaucoup aimé même si la série a été perdue dans mes déménagements nombreux. Qu'en est-il de la série des rois maudits dont on dit que GoT en est le reflet? A-t-elle fait aussi partie de tes lectures et inspirations médiévales?
Tu nous parles JdR aussi je suppose donc que tu as eu ta période rolistique , en tant que maître du jeu? joueur? les deux?
Est-ce que cette expérience t'aide à mettre en place plus facilement des décors et les situations de tes personnages?
Et enfin as tu un plan prédéfini sur la suite à donner à ton histoire ou tes personnages prennent-ils la tangente à un moment ou un autre pour n'en faire qu'à leur tête?
Bon ok en fait j'en avais plusieurs cachées sous le coude ;)
Merci en tout cas pour cette lecture que j'ai grandement apprécié découvrir et partager avec Licorne.

Grégory :



Bonjour Aely Nah !

Bombardement de questions ! ça explose ! ça explose ! Merci pour ton retour !

La saga des Rois Maudits est une lecture qui est arrivée sur le tard (en même temps que la rédaction du 2e tome). Et j’ai tout simplement adoré. La plume de Maurice Druon est délectable et ne manque pas de fulgurances. Pour rebondir à ce que tu disais, je dirais que c’est plutôt le Trône de Fer qui est le reflet des Rois Maudits. On y retrouve les inspirations de George R.R. Martin, de par ces rois qui s’éteignent les uns après les autres, comme une malédiction, et ce jusqu’à l’extermination de la dynastie, ou même de par quelques expressions (comme celle-ci notamment : « envoyer au mur » qui désigne la prison dans les Rois Maudits, et le Mur au sens littéral dans le Trône de Fer).

De là à dire que la lecture des Rois Maudits a fait partie de mes inspirations, je dirai donc oui, mais tardivement. Elle est arrivée comme un plus non négligeable. J’ai d’ailleurs souri en voyant que l’inimitié qui sévit entre Enguerrand de Marigny (proche conseiller du roi Philippe le Bel, de relative basse extraction) et Charles de Valois (comte) se rapprochait beaucoup de celle que je retranscris entre Philippe Gardeval et Othon de Ligias, tous deux gravitant autour de leur roi.

Quant au JdR, je n’ai fait que du jeu de rôle textuel, c’est-à-dire sur forum d’écriture RPG, donc virtuel. J’ai été à la fois joueur et maître de jeu, suivant ce que l’on nomme dans le jargon des « Rp » ou les créant. Mais, même en étant joueur, j’avais tendance à souvent prendre les choses en main, à prévoir la suite des évènements, à tourner le récit dans la direction qui me plaisait. Un travers qui m’a fait comprendre que j’étais fait pour proposer des histoires. Il était donc inévitable que j’en vienne un jour ou l’autre à l’écriture solitaire. Ceci dit, avant de me lancer, j’avais quand même créé mon propre forum RPG, et une petite centaine de rôlistes s’amusaient à créer leur personnage et leur histoire sur l’univers que je proposais : celui que tu commences à connaître aujourd’hui et dans lequel évolue timidement Philippe Gardeval.

Mes partenaires rôlistes savent donc que l’univers est grand, complexe et diversifié, et que la seule ville de Lysimaque dépeinte dans le roman n’est qu’un petit lambeau de l‘univers. Ce qui les a surpris. Certains m’avaient d’ailleurs demandé pourquoi je n’avais pas préféré écrire un roman-monde, tant le choix d’un huis-clos les avait un brin déroutés. Eh bien, tout simplement parce que je voulais mettre l’accent en premier lieu sur le personnage narrateur (travailler sa profondeur, son passé, sa voix) ainsi que sur l’ambiance. Quand j’aurai la maturité nécessaire, le monde s’ouvrira bien plus, mais il était d’abord question pour moi de contrôler un personnage dans un lieu fermé. Car, qu’on se le dise !, faire vivre un monde, dans tout ce qu’il a de vaste, de dense et de diversifié, est un travail colossal qui mérite qu’on prenne le temps. Au passage, j’en profite pour glisser ici que Sénéchal place déjà quelques éléments de la « grande intrigue » qui prendra place dans un autre roman très (trop ?) ambitieux. Sénéchal, en quelque sorte, est une introduction.

Bref ! je digresse allégrement ! J’en reviens à tes questions, milles excuses !

Ainsi, pour en revenir au jeu de rôle textuel (qui consiste à se créer un personnage de toute pièce de façon littéraire afin de le faire jouer dans un monde créé par d’autres) a vraiment été l’exercice qui m’a permis d’améliorer à la fois la plume, le jeu des personnages, leur articulation dans un univers défini, leur interaction avec d’autres personnages joueurs. Une expérience très constructive ! et ce n’est pas un hasard si la dédicace du tome 1 s’adresse « Aux célestiens » et celle du tome 2 « Aux miradelphiens ». Je remercie tous les joueurs rencontrés sur ces deux forums et qui ont grandement participé à mon évolution !


En ce qui concerne le libre arbitre de mes personnages, ils n’en ont aucun ! HA HA * rire sadique * Je prévois tout ce que je peux prévoir et ils suivent tous la ligne que je leur impose. La seule chose que je ne contrôle pas, c’est leur caractère et leur voix qui naissent sous la plume comme bon leur semble. Roufos, par exemple, est typiquement le personnage qui vit tout seul lorsque je l’écris. Rodenteux, cet architecte curieux et couard à la fois, est lui aussi parfois difficilement contrôlable tant il a envie de parler des merveilles architecturales qu’il rencontre ! Leur voix et leur caractère me surprennent souvent, mais, jusque-là, ils n’ont jamais dévié de ce que je voulais vraiment dire ou faire * Soupir de soulagement *

J’espère avoir répondu comme il se doit à tes questions ! Un grand merci pour ton intérêt, vraiment !





Merci pour cette réponse si détaillée Grégory ! Je comprends donc mieux la genèse de Sénéchal... Et remarque que, d'une, nous n'avons pas beaucoup d'écart en terme d'âge, et, de deux... Que les auteurs que tu cites font tous partie de mon harem d'incontournables : je me souviens encore comment la lecture du Déchronologue m'avait chamboulée, sans parler des deux autres (j'hésite encore à me lancer dans les autres romans de Justine Niogret qui se trouvent bien au chaud dans ma bibliothèque, tant Mordre le bouclier m'avait soufflée). Alors, deuxième question : quel est ton auteur préféré ? De touuuuus les temps ?

Grégory :

La question piège que voilà !

Je n’ai pas véritablement d’auteur préféré car je ne suis pas un lecteur fidèle (Ne me fais pas dire ce que je n’ai pas dit, mon infidélité n’est que littéraire, tudieu !).

Comme dit précédemment, je lis un seul roman par auteur, puis, une fois fini, je passe à un autre roman d’un autre auteur. En plus de ça, je lis peu. Non par manque d’envie, mais par lenteur. Comme je décortique mes lectures, je peux passer un temps inimaginable sur un roman d’à peine 300 pages. De fait, si je lis une quinzaine de romans par an, c’est la panacée.

Il n’empêche qu’il y a quand même des auteurs et autrices qui me font un petit quelque chose rien qu’en repensant à leurs ouvrages. Je vais peut-être manquer d’originalité, mais en ce qui me concerne, je ressens beaucoup d’admiration et de respect pour… * roulement de tambour *… J.K. Rowling. Eh oui ! J’en suis absolument persuadé : si la lecture de Harry Potter ne m’avait pas provoqué un si grand choc en étant gosse, je n’aurais jamais, jamais, jamais, pris la plume. Et même si ce que j’écris est bien loin de l’apprenti sorcier à lunettes, cette lecture m’a donné le goût de lire, puis d’écrire. Rien que pour ça, pour cette magie, cette vraie magie, qui a su s’opérer à cette époque clé de ma petite vie, je place donc J.K. Rowling largement en tête de mon « classement ». J’ai comme l’impression de lui devoir beaucoup. Non, en fait, c’est certain, je lui dois beaucoup.

Les deux autres présents sur le podium sont George R.R. Martin, pour les insomnies qu’il m’a refilées en première année de fac et pour les cours que j’ai ratés par sa faute, ne réussissant pas à me lever de mon lit (Ah, mon dieu, je me dois de le dire… les Noces Pourpres, à lire, c’était l’agonie extatique, la jouissance mortelle, le GAAAAAA, NOOON, UHHHH ! POURQUOOIIIII ILS SONT TOUS MORTS ET POURQUOI J’ADORE CA ? Oui, oui. Sache, Bouchon, que ces onomatopées sont à peine exagérées).

Et il y a aussi, inévitablement, Jean-Philippe Jaworski. Tout commentaire serait superflu !


Bonjour Grégory ^^ 

Géniale la présentation, ça donne le ton ! Je n'ai pas lu ton livre (oups, j'espère échapper au lynchage ! Il paraît que le Sénéchal est occupé à gérer un siège, je vais passer entre les mailles de son courroux ) mais ça ne m'empêche pas d'être intriguée et de venir participer à ce mois de. 

J'ai lu les réponses sur la genèse de Sénéchal et je trouve ça très intéressant. Ma question porte sur la suite de cette aventure : comment as-tu été publié ? Puisqu'il s'agit apparemment de ta première publication mais que tu avais écrit d'autres textes, comment en es-tu arrivé là ? Est-ce une finalité que tu visais dès le départ ?
Merci d'avance et bon mois de torture... heu d'interview ;)

Grégory :

Bonjour Emilie ! Point de lynchage, n’aie criante !

Comment ai-je été édité ? Hum… Moi-même, je me le demande encore parfois, tant tout est allé très vite.

J’ai achevé la rédaction du manuscrit en janvier 2016. Je me suis donné deux mois pour le relire, le corriger, le modifier. Une fois prêt (ou du moins, une fois que je pensais être prêt – Etait-ce vraiment le cas ? Je ne le sais toujours pas), j’ai envoyé à trois maisons d’édition : Mnémos, l’Atalante et le Bélial’. Pourquoi seulement trois ? Car mon entourage, depuis quelques temps, se montrait insistant et me soupçonnait de procrastiner et/ou de retarder les envois par crainte de me heurter à la dure réalité : la difficulté d’être édité. Par conséquent, j’ai envoyé sans y croire vraiment, ayant pour doux rêve de décrocher l’un des Indés de l’imaginaire (Mnémos, Les Moutons Électriques, ActuSF). Mnémos ayant été ma première cible, l’Atalante et le Bélial’ (qui font aussi un travail remarquable) ont, en revanche, été choisi un peu par hasard (en vérité, surtout pour prouver à mon entourage que je prenais les devants, preuve à l’appui : « Si, regardez ma boîte mail ! J’ai commencé à envoyer ! » leur disais-je… (Surtout que la ligne éditoriale de l’Atalante et du Bélial’, notamment celle du Bélial’ qui est bien plus axé SF, ne correspondait pas vraiment à mon manuscrit, ou très peu). Donc, je dois bien l’avouer, je ne croyais pas vraiment à la réussite de mon premier envoi, que je voyais plus comme un premier pas vers le casse-tête éditorial. Un premier pas, aussi, vers le courage.

Il n’empêche que 4 jours sont finalement passés et je reçois un mail des éditions Mnémos me disant que leur équipe a lu le manuscrit et qu’elle émet un avis favorable ! Je te laisse imaginer ma réaction. J’ai ouvert une bouche béante qui ne s’est refermée que 10 minutes plus tard. Le sang m’est monté à la tête. Je me suis levé de ma chaise, presque suffocant et, chose étrange, l’euphorie mais aussi et surtout la terreur se sont emparées du petit bonhomme que je suis. Le pire dans tout ça, c’est que je suis tellement défaitiste et peu sûr de moi que j’ai cru à une mauvaise farce, ma paranoïa me poussant même à croire qu’un de mes amis s’était créé une fausse boîte mail pour me donner de faux espoirs ! Mais voilà que 4 jours passent encore et, cette fois-ci, je reçois un appel de Frédéric Weil, directeur éditorial des éditions Mnémos, qui me dit « Ok, on y va ! ».

Et donc le 8 avril 2016, 8 jours après mon premier et unique envoi, l’édition m’ouvrait ses portes. Bien sûr, ça aussi, pessimiste que je suis !, c’était bien insuffisant pour que j’y crois. Même la conversation skype qui a suivi n’a pas suffi à me faire prendre conscience de ce qui était en train de se mettre en route. Il m’a fallu signer le contrat d’édition et commencer l’édito pour réaliser que tout était bien vrai. Avouns-le, je suis arrivé peu ou prou comme une météorite et l’impact, bon sang ! m’avait presque plongé dans un état de déni qui, parfois, je l’admets, se manifeste encore (Peut en témoigner mon éditeur qui fait toujours face, avec brio, à mes grands moments de doute). Il m’arrive toujours, c’est vrai, de me réveiller quelques matins en me demandant « Pourquoi ? Comment ? Que m’est-il passé par la tête ? Pourquoi ai-je poussé mon petit délire si loin ? » Alors que, bon, soyons honnêtes ! il va quand même falloir que je réalise un jour que j’ai à présent deux satanés bouquins en librairie !
De fait, s’il fallait que je donne des conseils pour être édité, je serais bien en peine de le faire. Je dirais peut-être qu’il faut beaucoup d’autocritique (sans pour autant tomber dans le dénigrement qui, lui, est anti productif). L’auto-critique permet de prendre du recul sur ce que l’on fait, de déceler ce qui fonctionne et ne fonctionne pas, d’aiguiser son regard sur sa création et celles des autres, d’affermir sa volonté, de murir aussi. Je dirais qu’il ne faut pas lésiner sur les heures de travail ; relecture, relecture, relecture et réécriture. Mon premier tome (certains peuvent en témoigner), je le connaissais au mot près. Je dirais également qu’il faut extrêmement soigner sa lettre de présentation ; elle est le premier contact avec l’éditeur et c’est un exercice littéraire à part entière. Inutile d’en faire des tonnes ni de rechercher (ou provoquer) absolument l’originalité. Soyez claire, concise, vraie, sûre, pleine d’ambition sans tomber dans la prétention. Bref, un exercice ardu mais qui, en ce qui me concerne, a été la clé qui a ouvert (très rapidement) la porte. Si mon manuscrit a été lu si vite, c’est justement parce que ma lettre de présentation est parvenue à intriguer. Elle ne brillait absolument pas par son originalité, mais elle avait sans doute les qualités citées précédemment. Enfin, je dirais aussi une chose qui, malheureusement, n’est pas en notre pouvoir, quoique nous fassions : il faut une part non négligeable de chance…


Pour ta deuxième question : comment en suis-je arrivé là ? Eh bien… à force d’écrire, je dirais. En fait, au commencement, je pensais écrire une nouvelle. Puis la nouvelle a très rapidement pris de l’ampleur. Je me suis résolu à en faire une novella : « 60 pages maximum ! » criai-je avec certitude au visage d’un ami qui riait d’avance. Evidemment, les 60 pages ont allégrement été dépassées, jusqu’à parvenir à la dernière phrase de l’actuel tome 1. En y mettant le point, à cette maudite phrase, j’ai senti quelque chose de très étrange, comme une certitude logée dans la poitrine et accompagnée d’un murmure lointain qui disait « La première partie est achevée. » C’est alors que j’ai décidé d’arrêter d’écrire et de corriger la matière que j’avais déjà devant moi. Je me suis rendu compte que j’avais ce qui pouvait s’apparenter à un premier tome et que, dans tous les cas, même si je voulais écrire un « one-shot » (comme on dit dans le jargon), je me retrouverai avec un pavé de 1000 pages à présenter à un éditeur, diminuant à mon sens drastiquement la chance d’être lu, et ce surtout lorsque son nom et son prénom ne sont connus ni d’Eve ni d’Adam (Je n’avais pas de première publication, jamais répondu à aucun appel à texte, ne me déplaçais pas en salon ni aux dédicaces en libraire, ne tenais aucun blog de critique ni aucune chaîne Booktube, bref, j’étais un inconnu, un vrai !). La difficile décision de scinder le roman en trois (ça y est ! c’est à ce moment-là que le mot « roman » a enfin été lâché et assumé !) a été prise. Pour conclure, j’affirme et je signe en disant que ce n’était pas prémédité, que la finalité première de ce texte était tout simplement d’être terminé, de me prouver que j’étais capable d’aller au bout d’une histoire, d’en maintenir le ton, d’en contrôler le personnage. L’édition, finalement, était le bonus auquel, au tout début, je ne songeais pas vraiment. Mais quel bonus !

4 commentaires:

Nath Aely a dit…

Ouah en fait avec toi,Gabriel chaque réponse est comme une nouvelle particulière ;)
Pleine de réponses, d'autres questions en suspens et d'aventure .
Je vais donc bien réfléchir à lui suite à donner à "mon" épisode lol et revenir ensuite te mettre au pilori :p

Nath Aely a dit…

Euh pourquoi Gabriel alors que c'est Gregory?????? fantasme? délire de lectrice?
du coup question lol
Gregory comment un auteur choisit-il les noms de ses personnages? sur quelles bases? et ceux de son monde, villes, religions ou autres??? cela a-t-il un certain sens et une certaine logique personnelle ou juste parce que c'est venu et que ça plaisait??

Les lectures de Licorne a dit…

Re-bonjour Gregory ! Merci de ta première réponse (je passe au tutoiement, on se connait un peu mieux maintenant), en tous les cas tu manies bien les différences de style, et je suis curieuse déjà de connaitre la facette “pure” de ton écriture. J’ai lu avec intérêt ton parcours, tu parles beaucoup de chance, mais tu oublies le talent, et Mnémos n’est pas passé à côté ! ;) Ton histoire est un rêve les yeux grands ouverts, et ça donne de l’espoir aux jeunes auteurs !
J’aimerai savoir s’il y a un genre autre que la fantasy dans lequel tu comptes t’aventurer un jour ?

Tout jeune écrivain que tu es, as tu peut-être déjà des habitudes lorsque tu écris, un rituel ? peux tu écrire n’importe où ? dois tu te mettre en condition particulière ?

Merci d’avance ;)

Emilie Milon a dit…

Un immense merci pour ta réponse Grégory ! Elle comble ma curiosité autant qu'elle m'est utile. C'est rassurant aussi de voir que des coups de cœurs éditoriaux existent encore parmi les auteurs francophones. Je peux te dire que ta réponse en 4 jours fait rêver !

En tout cas merci d'avoir partagé ton expérience avec tous ces détails. J'avoue que la lettre de présentation n'est pas du tout mon point fort. Déjà à l'époque des recherches de stage et d'emploi ça m'agaçait de la faire car je ne sais pas me vendre et à mes yeux le CV comptait davantage (même si oui je la personnalisais, je la soignais niveau orthographe). Même maintenant que je suis de l'autre côté de la barrière, quand j'examine des candidature je la lis à peine, juste pour mesurer les dégâts en termes de fautes. Le concret (le CV ou dans notre cas le manuscrit) m'intéresse plus que le blabla que l'on sait toujours un peu hypocrite de la présentation. D'un autre côté j'imagine aussi le genre de lettre que tu as dû joindre à ton manuscrit quand je vois ta présentation et tes réponses aux questions. Je comprends tout à fait qu'elle ait dû intriguer et séduire le comité de lecture tout de suite. Elle a dû sacrément sortir du lot !

Encore merci pour ton partage ^^